Salut à tous,
Pour l'ouverture de la page Facebook de ce blog - ici,
n'hésitez pas à y aller, commenter et partager -, voici un petit post
rétro, comme celui sur le Red Star qui l'avait inauguré, en janvier
dernier. D'ailleurs, le lien est double puisque je vais évoquer un des
anciens joueurs du club audonien, très ancien même : Eugène Maës.
Pour
cela, il faut remonter à l'avant-guerre. Pas la dernière, non, celle
d'avant, celle qui retourna la campagne ardennaise par ses tranchées et
ses bombes, pas toutes déterrées paraît-il, que la France, alliée aux
Anglais puis aux Américains, avait à peu près gagnée avant d'en profiter
pour écraser l'Allemagne lors d'un traité de Versailles qui se révèlera
encore plus meurtrier dans ses conséquences. Mais c'est une autre
histoire.
Avant tout cela, il y avait déjà du foot, même en France figurez-vous. Pas de championnat professionnel avant 1932, pas de
Coupe de France avant 1917, mais déjà des matches un peu partout. A
l'instant de la mobilisation générale de 1914, l’Équipe de France, elle,
avait dix ans, 9 victoires et 22 défaites au compteur, ainsi que... 163
buts encaissés, soit 4,53 par match. Une moyenne presque banale à une
époque où le concept de bloc équipe était aussi d'actualité que les coques d'iPhone. Mais les Bleus ont du attendre le début de la deuxième
décennie du siècle pour se découvrir un véritable buteur, régulier,
efficace, et pas seulement contre le Luxembourg.
Eugène
Maës, lorsqu'il est appelé en Bleu pour la première fois, pour un match
face à la Hongrie, joué à Maisons-Alfort le... 1er janvier 1911, évolue
au Red Star, après avoir appris à jouer au football au Jardin du
Luxembourg, avant d'évoluer sous les couleurs du Patronage Olier, un
club parisien de la Rue d'Assas, avec qui il remportera le fameux titre
de "champion de France de la FGSPF" (Fédération
gymnastique et sportive des patronages de France) en 1908, et le Trophée
de France en 1908 (contre Puteaux) et en 1910 (contre le CA Vitry). Âgé
de 20 ans, il empile déjà les buts, et est engagé en 1910 par le futur
grand club parisien des trente premières années du siècle, le Red Star.
Doué de la tête, il attendra sa troisième sélection pour marquer, et pas
lors de n'importe quel match. Il signe un doublé de renard contre l'Italie, à l'affut sur deux tirs repoussés, dans son stade de Saint-Ouen,
et la France, qui n'a plus gagné depuis 12 matches (12 défaites),
obtient un nul méritoire (2-2). Mais le Parisien de naissance fera
encore mieux.
Le 17 mars 1912, le militaire d'alors a obtenu une permission pour rejoindre à cinq heures du matin l’Équipe de France, qui affronte de nouveau l'Italie, cette fois au stade Campo de Turin. Contrairement au précédent duel entre les deux nations, les Bleus sont invaincus depuis trois rencontres, quand l'Italie n'a plus gagné depuis cinq rencontres, mais reste largement favorite de ce match. Pourtant, c'est Maës, pourtant fatigué par son voyage, qui ouvre le score dès la 10e minute (0-1). Rampini ne tarde pas à égaliser (1-1, 24e) mais l'attaquant audonien, qui avait marqué à chacun des quatre matches qu'il avait disputé depuis le France-Italie précédent, redonne l'avantage aux Bleus, de la tête sur un nouveau service de Louis Mesnier, l'attaquant du CA Paris (1-2, 38e), un des rares rescapés du premier match des Bleus contre la Belgique, en 1904 (3-3).
Ceverini égalise à son tour, juste après la pause (2-2, 47e), mais Mesnier se mue en buteur et marque le troisième but tricolore (2-3, 52e). Devinez quoi ? L'Italie égalise encore grâce au doublé personnel de Rampini, l'attaquant de Pro Vercelli (3-3, 58e). Et c'est Eugène Maës, en "chargeant" le gardien qui avait pourtant le ballon dans les mains, ce qui se faisait impunément à l'époque, qui marque le dernier but de ce match historique pour les Bleus (3-4, 66e). Historique, car il s'agit du premier succès des Bleus contre l'Italie - un autre suivra dès le début de l'année suivante, à Saint-Ouen, sur un but de... Maës - et le premier triplé d'un international français.
En 1913, Maës inscrira également un quintuplé contre le Luxembourg (8-0), performance que seul Thadée Cisowski parviendra égaliser, 43 ans plus tard, contre la Belgique (6-3). Il s'agira de la dernière sélection du joueur du Red Star, auteur au final de 15 buts en 11 sélections. Parmi tous les meilleurs buteurs de la sélection, il est le seul, avec Just Fontaine (30 buts en 21 sélections) à compter plus de buts que de matches.
Comme beaucoup de jeunes joueurs français, il ne ressortira pas indemne de la Grande Guerre. Blessé au combat, il ne pourra retrouver le niveau professionnel, à seulement 24 ans. Comme Fontaine, heureusement blessé de façon moins dramatique à 27 ans, il aurait sans doute battu tous les records s'il avait pu disputer une carrière entière en Équipe de France. Après la Guerre, il rejoint tout de même le tout jeune Stade Malherbe de Caen, ou il sera attaquant, capitaine et entraîneur, jusqu'en 1935, tout en menant une carrière de professeur de... natation.
Après avoir perdu ses chances de gloire internationale lors de la Première Guerre Mondiale, il perdra la vie lors de la Seconde. Dénoncé en juin 1943 pour propos anti-Allemand à une époque ou la délation était le sport national d'alors, il meurt à 54 ans en déportation au camp de Mittelbau-Dora, en Allemagne, le 30 mars 1945, alors que la France était libérée depuis plusieurs semaines.
Une époque quoi, un destin presque banal, bien que dramatique. Plutôt que faire des biopics sur Cloclo (réussi par ailleurs, ce n'est pas la question), j'imagine qu'on pourrait faire des films sur la vie de ce genre de joueurs, Maës ou Villaplane, attaquant et capitaine français lors du Mondial 1930 avant d'être fusillé en 1944, et dont la vie est racontée dans l'Equipe Mag depuis quelques semaines, ces amateurs qui devaient s'arracher à la vie quotidienne pour disputer des matches qui ne faisaient que quelques entrefilets dans les journaux, mais qui ont fait l'Histoire des Bleus sans le savoir vraiment, et qui n'ont finalement pas échappé aux évènements de leur époque. Un peu ce que l'on reproche aux footeux d'aujourd'hui, ces joueurs gâtés qui semblent vivre dans une bulle surréaliste, quasiment à l'abri des aléas de l'actualité.
A plus tard ! Et n’hésitez pas à réagir dans les commentaires !
bonjour
RépondreSupprimerexcellent article , bravo et merci
petite erreur ou coquille sur la date, toutefois,lorsque vous écrivez :Le 17 mars 2012, le militaire d'alors a obtenu une permission pour rejoindre à cinq heures du matin l’Équipe de France, qui affronte de nouveau l'Italie, cette fois au stade Campo de Turin.
En effet, grosse coquille, qui est modifiée ! Merci et merci pour votre commentaire !
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