jeudi 20 juin 2013

Fin de la progression

Salut à tous,

Il y a 10 ans, la France remportait, sur ses terres, la quatrième Coupe des Confédérations de l'Histoire, sa deuxième consécutive, en battant un Cameroun affligé après la mort tragique, en demi-finales, de son milieu défensif Marc-Vivien Foé (1-0). But de Henry, meilleur buteur de la Compétition avec quatre buts. Une époque glorieuse, dont la France a rarement semblé aussi éloignée dans son histoire.

Presque une défaite tous les deux matches

Tandis qu'actuellement l'Espagne et l'Italie, finalistes du dernier Euro et qu'elle toisait de haut il y a une décennie, disputent à sa place la septième édition de l'épreuve gadget - mais révélatrice quand même - de la FIFA, au Brésil, la France est en train de compter ses rares victoires récentes. Sur cette saison 2012-13, le calcul est rapide et cruel : en 11 rencontres, la France a gagné quatre matches, et voici les noms de ses "victimes" : si la présence de l'Italie - sur ses terres, en plus - est plus qu'honorable, celles de la Finlande, du Bélarus et de la Géorgie sont moins... impressionnantes. Surtout que les deux derniers cités ont été battus au Stade de France, sur des scores pas forcément ébouriffants (3-1 à chaque fois) et sans jamais parvenir à marquer le moindre but avant la 45e minute. Des succès à chaque fois convaincants, certes, mais pas non plus marqués du sceau de la classe.

Dans le même temps, la France a perdu cinq fois, ce qui indique donc un bilan général négatif, vous l'aurez compris. Défaites contre le Japon en amical, en octobre (0-1) puis quatre autres en cette année 2013 qui s'annonce d'ors et déjà catastrophique sur le plan des résultats, qualification pour le prochain Mondial ou pas : Allemagne (1-2) et Espagne (0-1) au Stade de France, puis en Uruguay (1-0) et au Brésil (3-0) lors de la récente tournée sud-américaine.

Loin des meilleurs

Là encore, le très reluisant pedigree des vainqueurs - tous champions du monde, voire multi pour trois d'entre eux, même si ça date sérieusement pour la Céleste - de la France depuis février dernier relativise quelque peu ce bilan rachitique. Mais ces dernières années la France, on l'a vu, s'était imposée en Italie, mais aussi en Allemagne (1-2), avait battu deux fois l'Angleterre (1-2 et 1-0), ou le Brésil (1-0), et avait tenu tête à la Roja en Espagne à l'automne dernier (1-1). Pourtant, on parlait là aussi d'équipe en construction, et là aussi on pouvait craindre des défaites cinglantes face à ces équipes qui nous étaient logiquement supérieures, mais à chaque fois on avait fourni des prestations solides, qui avaient démontré que même si on ne disposait plus d'une des meilleures équipes du monde, on possédait encore suffisamment de bons joueurs pour rivaliser ponctuellement avec les meilleurs. Ce n'est manifestement plus trop le cas.

Et alors qu'on pensait que la France, avec ce quart de finale obtenu lors du dernier Euro, première phase de poule réussie depuis 2006, avait enfin entamé la face ascendante du creux générationnel qui la frappe depuis une demi douzaine d'années maintenant, la voilà qui rechute dans des profondeurs très inquiétantes, qui semble voir sa progression récente sérieusement entamée. Oui c'était de gros pays, mais après ces quatre défaites en cinq matches, après ces trois matches consécutifs sans marquer, ces trois défaites d'affilée, une première depuis trois ans - une série inédite sous Domenech, je dis ça comme ça - qui imagine sérieusement la France terminer devant l'Espagne dans son groupe qualificatif ?

Et, dans la mesure où son classement FIFA très faible - 18e, 13e Européen - lui garantit presque à coup sûr une non protection lors des barrages, qui peut l'imaginer battre un des gros morceaux qui se présentera devant elle ? Au vu des actuels deuxièmes, elle serait accompagnée par la Bulgarie, l'Autriche, la Hongrie et l'Albanie pour défier la Croatie - 3e Européen ! - , la Russie, la Grèce ou... l'Angleterre, voire le Portugal si ce dernier est devancé par la Russie, qui compte deux points et deux matches de moins à jouer. Je ne vous cache pas qu'il faudrait un sacré coup de chance - en d'autres termes, la Grèce - pour espérer passer. Sinon, ça s'annonce très très tendu. Pour être tout à fait honnête avec vous, je ne crois plus trop à cette qualification. Il fallait bien que ça arrive, 20 ans après son dernier échec, pour la World Cup 1994 aux États-Unis. Cette défaite contre l'Espagne - évitable, au vu du contenu - fait vraiment très mal.

Toujours pas d'équipe type...

Didier Deschamps, comme Laurent Blanc avant lui, dispose d'un crédit quasi illimité auprès des médias, malgré ces résultats très mauvais, que n'aura jamais eu le pauvre Raymond Domenech, qui a eu le tort de ne pas faire partie de la génération 98. Cette dernière, après lui avoir donné la leçon et réclamé par de lourds sous-entendus de passer au pouvoir afin de démontrer à quel point eux ont raison et les autres tort, se retrouvent face à la réalité des choses : avant c'était la faute de Domenech et maintenant c'est la faute des joueurs ? Non, c'était trop facile. La réalité c'est que, lui comme eux, ne peuvent pas faire de miracles avec une génération de joueurs moyens-bons, sans véritable charisme, qui ne parviennent toujours pas à se comporter comme les patrons dont l’Équipe de France a tant besoin.

Les patrons ne se décrètent pas, et ne se trouvent pas sous le sabot d'un cheval. Il se forge avec l'expérience et le nombre de sélections, un problème pour cette jeune équipe. Elle pourrait compter sur ses anciens en termes de cape, Ribéry (73), Benzema (58) ou Lloris, son capitaine (47) mais ils ont du mal à vraiment endosser ce rôle, et je n'ai jamais été convaincu par le fait de nommer les gardiens capitaines, eux qui sont si loin du jeu. Nasri (35) et Sagna (34) ? Pas vraiment indiscutables en Bleu, même s'ils le sont plus que Gourcuff (31) Mexès (29) ou Rami (26). Cabaye (23) ? Oui, ce serait logique, mais c'est loin d'être le cas. Il a même été moins appelé que Matuidi cette année, et voit la concurrence de Pogba le menacer... Les patrons se trouvent souvent en défense centrale, on y avait presque cru quand Blanc avait fait confiance pendant deux ans à la charnière Rami-Mexès, qui, à défaut de toujours rassurer, avait au moins apporté un peu de stabilité, et donc de sérénité. Depuis ces deux là ont quasi disparu, et ceux qui jouent désormais - Koscielny, Sakho et Varane - sont encore en cours d'apprentissage du niveau international. Et surtout, aucun d'entre eux ne s'est encore imposé. Pas de patron donc dans ce secteur non plus...

Au fond, il faut juste essayer de compter les joueurs de très haut niveau que compte la France. Son gardien ? Oui, peut-être. Pas sûr... En défense, Varane s'en approche mais c'est encore tôt. Au milieu il y a Matuidi, et Pogba, peut-être. Comme Varane, c'est encore tôt. Cabaye ? Terminer 16e de Premier League semble rédhibitoire. En attaque ? Oui pour Ribéry, pas encore pour Valbuena, qui n'a rien démontré en club au plus haut niveau, mais pas pour Benzema. Il n'est plus vraiment titulaire au Real, où il marque moyennement, et est inexistant en Bleu. Le statut c'est bien, les passes décisives aussi. Mais faire moins bien en terme de moyenne de buts par sélection que Steve Marlet ou Patrice Loko... c'est vraiment problématique. La comparaison avec les meilleurs buteurs du monde actuel est très cruelle pour Benzema, qui a du talent mais le cache complètement en Bleu. En tous cas, deux joueurs vraiment avérés au très haut niveau, ça fait très peu. Trop peu !

Un bilan catastrophique

A l'heure actuelle, à la moyenne de points (rapportée à deux par match, comme d'habitude, pour plus de vérité), Didier Deschamps possède le 13e bilan d'un sélectionneur depuis 1964 avec 0,91, devançant Henri Guérin (0,82), Louis Dugauguez (0,78) et Just Fontaine (0), qui ont tous connu la pire décennie des Bleus, les années 60, et loin derrière des sélectionneurs décriés par les médias comme Santini (1,71), Lemerre (1,49) et Domenech (1,34), le sixième de l'histoire. Laurent Blanc est lui quatrième (1,44), preuve que sous son égide, les résultats n'étaient pas fabuleux mais en progrès, au moins. Depuis, le rechute est pire que la chute elle-même, après 2006. En tous cas, pour l'instant, les deux anciens patrons de France 98 font nettement moins bien à eux deux (1,29) que leur si estimé collègue.

Ce qui inquiète dans le bilan de Deschamps depuis un an, en plus du grand nombre de défaites après 11 matches - il a déjà plus perdu que Blanc avec 16 matches de moins - c'est le nombre de buts faméliques inscrits, 11, soit un par match. On passera sur le cas de Benzema qui, ça l'a été assez dit, bénéficie surtout de l'absence de concurrent véritable à son poste, maintenant que les gens se sont enfin rendu compte de la faiblesse de Giroud au niveau international, et des autres candidats au poste (Gomis, Gignac...). Elle a signé cinq matches sur 11 sans marquer, dont les trois derniers, et seulement trois matches à au moins deux buts. Avec une pointe ou deux, un meneur axial ou deux excentrés, deux ou trois milieux défensifs, le problème reste le même : la France se crée pas franchement beaucoup d'occasions, et n'est pas efficace sur ces dernières. Elle marque quasiment que dans le jeu - 9 sur 11 - démontrant à la fois qu'elle a quand même de la qualité avec Ribéry et Valbuena, mais aussi sa traditionnelle mais toujours dramatique aptitude à mal tirer les coups de pied arrêtés, une des armes majeures aujourd'hui dans le foot. Aucun défenseur n'a marqué cette saison en Bleu, et seulement trois fois par des attaquants de pointe. le meilleur buteur - et non passeur, ce dernier est Ribéry (4) - se nomme Valbuena (3).

Les jeunes nous sauveront-ils ?

L'avenir, ce sont ces jeunes, Varane et Pogba, qui doivent l'incarner. Ces deux là sont évidemment trop jeunes pour être considérés comme des cadres, et il est encore tôt pour affirmer qu'ils sauveront la France... combien de jeunes ont été cramés par cette pression ces dernières années ? En tous cas ceux qui ont été alignés ce printemps en Amérique du Sud, notamment Grenier ou Lacazette, ne sont pas vraiment du même acabit. La France aura toujours de la réserve, mais pas forcément de quoi la maintenir dans les dix meilleurs mondiaux. Sur sa dernière tournée, on en était même très loin. Espérons que les Bleus qui s’apprêtent à disputer le Mondial des moins de 20 ans cet été nous apportent enfin un peu d'espoir ! Les Espoirs qui n'ont plus fréquenté la phase finale de l'Euro depuis 2006, et plus connu de finale depuis 2002, avec Landreau, Réveillère, Escudé, Boumsong, Govou, Luyindula, Meriem, Mexès, Pedretti... tous internationaux, aucun d'entre eux n'a vraiment percé en Bleu. Comment voulez vous construire une équipe A de qualité avec de si mauvais résultats en jeunes ?

A plus tard !