Bonjour à tous,
Après cette nouvelle semaine fructueuse (je ne suis pas revenu sur ce très bon match des Bleus en Italie parce que c'était juste un match amical et que j'étais pas mal occupé, mais j'y reviendrais prochainement, promis) et avant cette 13e journée de championnat, revenons sur le double évènement de la semaine : le quadruplé de Zlatan Ibrahimovic contre l'Angleterre, en amical là aussi (4-2), et le quatrième but absolument dingue du du Suédois.
D'abord quelques chiffres, si vous le voulez bien. En plus, vous en avez l'habitude avec moi.
Ça porte son total en sélection à 39, en 85 sélections, sachant qu'il en avait mis que 4 lors des 16 premières. A l'orée de l'Euro 2012, il en était juste à 33 en 80 sélections, de bons chiffres, mais un peu éloignés des codes des meilleurs buteurs mondiaux, qui se rapprochent plus, en général, des 0,50 buts par matches. Mais sur les six derniers mois, Ibra s'est rapproché de ce rapport, en inscrivant 6 buts en 5 sélections. Dont ce quadruplé, donc. Sur l'année civile, Ibrahimovic finit avec 11 buts en 11 sélections. Dans les grandes sélections mondiales, seul le Brésilien Neymar (9) et évidemment Lionel Messi (12), possèdent des chiffres comparables.
Avec ses 39 buts, donc, il serait le troisième meilleur buteur français de l'Histoire (derrière Henry, 51, et Platini, 41), et il est également le troisième suédois, derrière Sven Rydell (49 buts en... 43 matches, entre 1923 et 1932) et le mythique Gunnar Nordhal, ex grand attaquant du Milan AC dans les années 50, et auteur de 43 buts en 33 sélections, de 1942 à 1948, avant son expérience italienne donc (49-56) ! Tout simplement parce que l'époque, seuls les joueurs évoluant en Suède étaient retenus... Surtout, en une soirée, Ibrahimovic a non seulement rejoint mais dépassé un autre mythique attaquant suédois, fils d'immigré lui aussi, Henrik Larsson, auteur de 37 buts entre 93 et 2009, en 106 sélections.
A noter qu'au sein de la sélection suédoise, on compte quand même quelques belles gâchettes, comme Markus Rosenberg (0 but en 3 sélections), Johan Elmander (2/6) ou Ola Toivonen, l'excellent attaquant du PSV Eindhoven, encore méconnu mais pas pour longtemps (2/8). Mais les deux suivants au classement des buteurs suédois cette année se nomment Tobias Hysen et Sebastian Larsson. Deux milieux, crédités de 3 buts chacun. L'année dernière, ils étaient 6 meilleurs buteurs à 3 buts, dont déjà Hysen, Larsson, Elmander et... Ibrahimovic. Plus que n'importe quelle année depuis 10 ans, et à l'image de l'Euro, Ibra a vampirisé toute l'attention en sélection. Comme au PSG, en quelques sortes... Est-ce facile ou difficile à vivre pour des internationaux en général confirmés, des trentenaires bien installés, réduits au rôle de spectateurs du phénomène ? Une bonne question que voilà, quelque soit les résultats. En tous cas, sur les quatre buts, on ne compte qu'une seule passe décisive d'un de ses partenaires, signée du vétéran (36 ans) Anders Svensson...
Par ailleurs, je trouve que la Suède est une sélection parfaite pour lui : peu d'égos pour le gêner, une attitude bienveillante à ses frasques... il aurait joué pour l'Italie ou même la France, tout serait serait nettement moins bien passé, ne serait-ce que dans les médias. Les caractères étrangers amusent les médias français, les caractères locaux en revanche, beaucoup moins. Sauf quand ils prennent leur retraite, comme pour Cantona par exemple...
Maintenant, revenons sur ce but d'extraterrestre. Au passage, je ne souhaite à aucun extraterrestre, aussi souple soit-il, de tenter un tel geste, sans avoir une bonne assurance vie. Pas sûr que ET ait pu marquer un but pareil. Pour que ce but ait pu avoir lieu, plusieurs paramètres ont du intervenir.
- D'abord, que l'Angleterre soit menée, et déplumée. On joue la 91e minute, le score est de 3 à 2 pour la Suède, qui a pourtant été menée (1-2) de la 38e à la 78e minute ! L'Angleterre fait le forcing et joue haut, notamment ses latéraux, avec pourtant en défense quelques débutants comme Carl Jenkinson (Arsenal), Ryan Shawcross (Stoke) et même l'attaquant Wilfried Zaha, Ivoirien d'origine et qui évolue à... Crystal Palace, en Championship, où il ne marque même pas beaucoup (4 buts en 15 matches) et de Steven Caulker (Tottenham), auteur du premier but, mais qui n'était plus là au moment de l'effondrement de son équipe, après sa sortie à la 74e à la place de Shawcross, donc. Bref, une équipe d'Angleterre, certes, mais qui n'en avait pas forcément le talent. Une nouvelle preuve d'absence de profondeur d'effectif pour le onze de la Rose, la Premier League comptant un très grand nombre de joueurs étrangers. Son meilleur buteur se nomme Danny Welbeck, qui a marqué son 5e but de l'année en sélection, mais qui n'a joué que 697 minutes avec Manchester United cette saison, soit l'équivalent de 7,7 matches, lui qui doit se faire une place entre Van Persie, Rooney ou Hernandez... avec à la clé un petit but.
- Ensuite, conséquence logique du paragraphe précédent, une défense pas terrible, et notamment son gardien. Un long ballon suédois, aucun des deux défenseurs anglais qui devancent Ibra n'intervient, contrairement à Joe Hart qui sort de son but pour jouer le ballon de la tête. Mais son coup de casque n'est pas assez puissant, loin de là, puisque le ballon n'effectue qu'un court trajet lobé, ce qui offre le cuir à Zlatan, ou plutôt un petit peu derrière lui. Dans le même temps, Hart recule vers son but, mais il est trop loin. Ses deux défenseurs, Cahill et Caulker - les deux latéraux, Jenkinson et Baines, sont trop loin - sont plus proches du but, car ils n'ont cessé de reculer. Quand Ibrahimovic tente son retourné, à la fois puissant et lobé, il lobe Hart et Cahill, mais Shawcross se précipite pour sauver le ballon, il est à deux doigts de le toucher. Mais il arrive trop tard.
- Il faut aussi que ce soit un match amical, que son équipe mène, et qu'il soit un peu dingue. Que risque-t-il, au pire ? Se démettre une vertèbre en retombant ? Il possède un corps exceptionnellement solide, même à 31 ans, et il en a vu d'autres. Rater son geste ? Pas grave, même si il avait tiré juste à côté ou que Shawcross ou un autre aient pu l'intercepter, on aurait quand même crié au génie, comme pour le lob de Pelé sur Ivo Viktor ou son grand pont sur le gardien uruguayen lors du Mundial 70, à chaque fois des gestes fabuleux mais... ratés. Et si ça avait été manqué, vu la difficulté du geste, qu'aurait-on pu lui reprocher ? De ne pas avoir gardé le ballon, vu que son équipe tentait de garder un résultat ? C'était trop tentant : le but été déserté, le gardien et les défenseurs en étaient loin et lui avait le ballon, pourquoi pas ? Un bon joueur bien sage aurait peut-être essayé de contrôler la balle, laissant la défense anglais se remettre en place mais glanant quelques précieuses secondes. Un grand joueur tente sa chance. Ça réussit, il est génial, et la Suède est à l'abri. Ça rate, il est génial parce qu'il a tenté, ça fait six mètres pour l'Angleterre, ce qui offre quand même quelques secondes à la Suède. Deux façons de penser le football. Pour ma part, j'ai choisi la mienne.
- La réussite, bien sûr, comme dans toute entreprise de ce type, toute prise de risque. Marquer un coup-franc, voire même un penalty, convoque également la réussite. Marquer de loin comme de la tête, il faut avoir la baraka. Mais là, tout s'accumule. J'ai déjà parlé du comportement peu efficace de la défense anglaise sur le coup, ce qui revient à de la chance pour Zlatan. Il faut aussi que le ballon lui revienne parfaitement. Il faut qu'il réussisse son geste. Je ne sais pas vous, qui avez sûrement plus pratiqué le football que moi, à mon grand regret, mais quand je m'imagine essayer un retourné acrobatique, j'ai mal partout. J'ai peur de me froisser une dizaine de muscles, de me faire mal en retombant... et il faut que le ballon soit cadré, et qu'il rentre. Réussir le geste ne garantie pas que le ballon soit cadré pour autant, et qu'il n'y ait personne sur la ligne pour le stopper. L'avantage de la bicyclette, c'est qu'elle vous fait gagner en effet de surprise sur vos adversaires. Pas beaucoup, mais un peu.
- Et enfin, le talent, bien sûr. C'est quand même ça qui fait la différence. Combien d'attaquants dans le monde se sont retrouvés dans cette situation, en ne parvenant pas à marquer de retourné acrobatique pour autant ? Honnêtement, je pense avoir vu beaucoup de buts dans ma vie, en direct ou en archives, et objectivement je n'avais jamais vu un but pareil, une tentative aussi folle, et réussie qui plus est. Le talent, c'est d'oser faire ça, et le réussir. Il
fait 1m95, et pèse 95 kilos. Il a frappé le ballon à 2m5 du sol (8
pieds pour les Anglais, qui en ont des grands apparemment), et a scoré d'un peu moins de 30 mètres (30 yards). Pour marquer, le ballon lui arrivant au-dessus de lui, et pour garder de l'avance sur les trois hommes qui le précèdent vers le but, il est contraint de tenter le ciseau plutôt que de contrôler et frapper, où de passer à un partenaire mieux placé - il n'y en a qu'un, qui se balade sans conviction dans l'axe. Et il doit lober son ballon, sinon un des défenseurs ou le gardien l'attrapera probablement. Bref, son idée est géniale, et il l'applique parfaitement. C'est du talent concentré.
Voilà, espérons maintenant qu'il réédite ce genre de performances en Ligue 1 et en Ligue des Champions, face à des défenses moins enclines aux grands espaces !
Je vous laisse.
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